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7 juillet 2014 1 07 /07 /juillet /2014 10:59

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L’Espagne n’a plus la cote parmi les expatriés européens. Ceux qui y avaient pris leur retraite s’inquiètent des effets du nouveau code des impôts, la barrière linguistique s’avère gênante, les jeunes manquent d’opportunités, le coût de la vie augmente. Bilan : il y a beaucoup plus d’Européens qui plient bagage et quittent l’Espagne – sans idée de retour – qu’il y en a qui viennent s’installer.
 
Les chiffres de l’Instituto Nacional de Estadistica (INE, l’institut national de la statistique) sont formels : plus d’un demi-million d’étrangers ont disparu l’an dernier des registres d’état civil, dont une majorité de ressortissants européens. Sans compter les Roumains et les Bulgares, quelque 219 225 citoyens européens sont rentrés dans leur pays en 2013. La communauté britannique, la plus forte après les Roumains et les Marocains, a décru de 22,8% par rapport à 2012, l’allemande de 23,6% et la française de 12,7%.
 
Inversement, les Européens ne sont que quelques dizaines de mille à être venus s’installer en Espagne.
 
Une partie des radiations de l’état civil s’explique par les efforts des municipalités pour sortir de leurs listes de résidents tous ceux qui n’ont donné aucun signe de vie depuis deux ans.
 
Mais cela n’explique pas tout.
 
La nouvelle loi qui oblige tous les résidents à déclarer le patrimoine dont ils disposent à l’étranger via le désormais célèbre formulaire « modelo 720 » visait à lutter contre l’évasion fiscale. Mais elle inquiète fortement les expatriés venus là pour prendre leur retraite. Pour eux, le gouvernement espagnol n’a pas à mettre son nez dans les biens et les pensions des retraités, acquis dans leur pays après une vie de travail. Ils n’ont pas envie de revivre l’exemple de la Grèce, où le gouvernement a purement et simplement saisi une partie des biens des expatriés. Car comme son homologue grec il y a quelques mois, le gouvernement espagnol est aux abois et a désespérément besoin d’argent. En conséquence de quoi de nombreux expatriés ont plié bagage, et d’autres ont préféré vendre leur bien en Espagne et s’y faire locataires pour échapper à l’enregistrement sur l’état civil et au « modelo 720 ».
 
Ce n’est pas tout. Ces retraités comptaient souvent sur des petits boulots tels que l’entretien de résidences secondaires, le jardinage, le nettoyage des piscines, etc. pour compléter leur pension. Mais, crise aidant, ces travaux se raréfient, et les retraités eux-mêmes prennent de l’âge et ne sont pas toujours en mesure d’effectuer des travaux pénibles. Leur niveau de vie s’en ressent. Vu que les prix ont augmenté, notamment ceux du gaz et de l’électricité, leur retraite ne leur permet plus de vivre dans l’aisance sur leur seule retraite comme c’était le cas il y a quelques années.
 
Ceux qui avaient acheté une maison n’ont pas envie de voir leurs héritiers payer de fortes taxes après leur décès, si d’aventure les taxes sur les successions augmentaient. Certains préfèrent vendre tant qu’il en est encore temps et partir se réinstaller dans leur pays.
 
Les services sociaux de Calpe, près d’Alicante, où 60% des habitants ne sont pas espagnols, voient de plus en plus de retraités européens quitter l’Espagne tout simplement parce qu’ils n’ont plus les moyens d’y vivre : 5 000 de ces retraités ont disparu des registres l’an dernier. Torrevieja, également située près d’Alicante, a vu 15 000 des siens plier bagage. Les municipalités s’en inquiètent, car les taxes d’habitation ne rentrent plus dans les caisses et des quartiers entiers se vident.
 
Beaucoup de ces retraités européens sont arrivés là dans les années 1990, attirés par le soleil et par des conditions de vie plutôt favorables. Aujourd’hui, ils vont sur leurs 80 ans, se voient vieillir loin de leur famille, dans un pays dont ils parlent mal la langue à force de vivre entre gens de leur communauté d’origine. Quand ils doivent aller chez le docteur, à l’hôpital, ou faire venir une infirmière, la communication est difficile. Ils sont incapables d’expliquer ce dont ils ont besoin ou ce dont ils souffrent.
 
Mais l’exode ne concerne pas que les personnes âgées. Les jeunes qui étaient venus s’installer en vivant de petits boulots font face à la même raréfaction de l’offre que les seniors. Ceux qui étaient venus travailler dans le bâtiment comme maçon sont frappés par la crise de l’immobilier. Et les Espagnols prennent leurs places, les réduisant au chômage. Les métiers du tourisme, organisés en filières visant à attirer en Espagne les compatriotes des expatriés ou pour satisfaire leurs besoins sur place, voient leur clientèle se raréfier. Rien qu’à Calpe, cinquante de ces entreprises ont dû fermer leurs portes ces dernières années. Même les cours d’anglais ou d’allemand pour les gamins espagnols ne paient plus, leurs parents n’ayant plus les moyens de leur offrir des cours particuliers.
 
Le rêve espagnol a du plomb dans l’aile. Ou plutôt : l’Espagne rêvée n’est pas l’Espagne d’aujourd’hui. Pour les Espagnols comme pour les étrangers.
 


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